Face à la hausse des taux d’intérêt et à la menace d’une récession, les investisseurs en actions américaines pourraient être naturellement tentés de se ruer vers la sortie. Néanmoins, il convient de noter que, par le passé, les petites capitalisations ont surperformé l’indice large S&P 500 en de telles circonstances. Le gérant de portefeuille américain Geoff Dailey estime qu’il y a de bonnes raisons que ce soit encore le cas cette fois-ci (au bout du compte).[1]
Contrairement aux tendances observées par le passé, il est vrai que les petites capitalisations ont sous-performé dernièrement alors que le spectre de la récession mine le moral des investisseurs dans un contexte d’aversion au risque générale sur les marchés actions (cf. graphique 1).
Les valeurs biotech de petite capitalisation ont été particulièrement malmenées. Ces entreprises sont généralement à un stade de leur croissance qui suppose de lever des capitaux. Or elles sont aujourd’hui confrontées à un durcissement des conditions de financement. Les grandes valeurs biotech sont, en règle générale, relativement épargnées par les pressions de ce type. Les petites valeurs biotech ont ainsi sous-performé les grandes capitalisations du secteur de 1 500 points de base (pb) sur les six derniers mois.
Il apparaît également que les secteurs habituellement défensifs comme les biens de consommation de base et les services aux collectivités ont plus de mal à gérer et à répercuter la hausse des coûts du transport, des matières premières et de la main-d’œuvre. Voilà pourquoi ce segment, qui fait généralement figure de valeur refuge, sous-performe celui des grandes capitalisations d’environ 1 000 points de base sur la même période.
Le risque de récession surestimé par les marchés
La conjoncture économique aux États-Unis peut être qualifié d’instable mais le risque de récession est faible et, même s’il est vrai que la hausse des taux d’intérêt est susceptible de peser sur la valorisation des actions, les perspectives bénéficiaires sont encore très bonnes. Les récentes révisions à la hausse sont encourageantes.
Pour remettre en perspective le relèvement des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine, le resserrement de la politique monétaire vise évidemment à freiner l’inflation mais cela est possible car l’économie américaine flirte avec le plein-emploi et n’a plus besoin des mesures monétaires exceptionnelles prises pendant les confinements. Les perspectives de croissance restent supérieures à la moyenne de long terme observée avant la pandémie en dépit de la désorganisation des chaînes d’approvisionnement et des turbulences géopolitiques.
Un examen du comportement passé des actions (S&P 500, secteurs, styles, capitalisations) lorsque la Fed relève ses taux directeurs, en tenant compte de nos hypothèses pour les 12 prochains mois (ralentissement de la croissance, décrue de l’inflation et conditions financières toujours accommodantes l’ensemble), l’environnement nous semble favorable aux petites capitalisations.
En effet, la récente contraction des valorisations et le changement d’humeur des marchés peut être perçu comme une bonne nouvelle (pour un investisseur contrariant, une mauvaise nouvelle en est une bonne).
Aller à contre-courant
Les petites capitalisations se comportent comme s’il y avait une probabilité élevée de récession et de ralentissement de la croissance bénéfices. Nous ne sommes pas de cet avis. De nombreux indicateurs sont au plus bas depuis 10 ans ou presque mais nous y voyons des signaux encourageants (encore une fois pour un investisseur contrariant). Aux niveaux actuels, nous avons déjà dépassé la correction habituelle observée pendant les récessions (avérées).
Le ratio cours/bénéfices à 12 mois est tombé à 13 à la mi-avril, ce qui correspond (abstraction faite du choc de mars 2020) à son plus bas niveau depuis 2011. Il pourrait s’agir d’un point d’entrée intéressant à un moment où, à notre avis, de nombreux facteurs fondamentaux plaident pour une exposition aux petites capitalisations.
On peut s’attendre à ce que les marchés restent volatils compte tenu de la pression inflationniste et de l’incertitude quant à l’évolution des taux directeurs aux États-Unis, la résolution des dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement et l’issue de la guerre en Ukraine. Nous envisageons cette volatilité comme une opportunité car nous cherchons à déceler les entreprises gagnantes à long terme pour réaliser des achats à bon compte.
Les valeurs de la santé et de la finance sont attrayantes
D’un point de vue sectoriel, nous apprécions les valeurs de la santé, notamment les entreprises innovantes qui mettent au point des médicaments pour des maladies contre lesquelles il n’existe pas de traitement ou répondant à des besoins cliniques insatisfaits.
Autre secteur intéressant : celui de la finance, où les petites capitalisations ne sont pas influencées par les mêmes facteurs que les grandes capitalisations. Les valeurs bancaires de petite capitalisation sont des paris à l’échelle nationale davantage sensibles à la hausse des taux d’intérêt, en dernier ressort à l’augmentation des écarts de crédit, et moins exposés aux aléas des marchés de capitaux et au métier de la gestion d’actifs. En effet, dans ce segment, les estimations de bénéfices en 2022 et 2023 ont augmenté dernièrement.
Ces valeurs se négocient actuellement à hauteur de 10 fois leurs bénéfices 2023, un ratio nettement inférieur à sa moyenne de long terme, qui est de 14. Les petites valeurs bancaires de grande qualité, qui s’appuient sur les nouvelles technologies, présentent à nos yeux un profil risque/rendement favorable.
Références
[1] Écoutez aussi Talking heads – US small caps – Fortune favours the bold – Investors’ Corner (bnpparibas-am.com)
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