- Plusieurs considérations clés sont importantes pour l’année à venir. Nous en identifions quatre : la probabilité et l’ampleur de la récession économique ; la trajectoire à court terme et le taux terminal attendu de l’inflation ; les réactions des banques centrales à cette situation ; et les perspectives de désynchronisation de la croissance mondiale.
- Nous « ne privilégions pas » la prise de risque globale au sein de nos portefeuilles multi-actifs et nous nous situons dans le quintile prudent des fourchettes en termes de budgets de risque et d’écart de suivi maximum. Nous sommes neutres à l’égard des actions – position longue sur la Chine et les États-Unis contre position courte sur l’Europe. Nous maintenons notre position longue sur les obligations d’entreprise européennes Investment Grade et sur les matières premières, pour lesquelles le profil rendement/risque reste intéressant, selon nous.
- Les valorisations des marchés actions se sont détériorées après le rebond du quatrième trimestre 2022, mais les prévisions de bénéfices sont probablement encore trop élevées dans certaines régions, notamment en Europe.
- Nous privilégions les valeurs technologiques américaines, dont les bénéfices attendus et les valorisations ont beaucoup reculé. Nous apprécions également les actions asiatiques, tant l’Asie émergente en général que la Chine en particulier.
- Les marchés obligataires indiquent des risques de récession croissants, avec une inversion soudaine des courbes des taux obligataires nominaux ; en revanche, une issue de type « Goldilocks » est escomptée par les courbes de point mort légèrement ascendantes. Globalement, nous sommes neutres sur les emprunts d’État, notamment les bons du Trésor américain.
Une page blanche en ce début d’année 2023. On serait tenté de le souhaiter en jetant un bref coup d’œil à 2022, la pire année depuis 1937 pour un portefeuille composé de 60 % d’actions et de 40 % d’obligations. Les pertes ont été de 17 % en dollars américains, contre des gains moyens de 12 % depuis le milieu des années 1980. Il est important de noter que ces rendements exceptionnellement faibles sont davantage à mettre au compte des obligations que des actions.
Où en sommes-nous pour 2023, et quelle est la différence avec 2022 ?
Au début de l’année dernière, le risque extrême lié à la forte hausse des rendements obligataires réels était au cœur de notre attention et a constitué notre stratégie la plus fructueuse sur les marchés des actifs. Début 2023, nous voyons quatre considérations clés qui seront au cœur du comportement du marché et des opportunités d’investissement pour les 12 prochains mois. Il s’agit de :
- La probabilité, le séquencement et l’ampleur d’une récession économique. Alors que le plus large consensus jamais atteint prévoit une récession marquée en 2023, notre regard se porte sur la solidité des bilans dans le secteur privé et les signes de stabilité provisoire des principales données. Il est donc possible qu’en cas de récession, celle-ci soit moins prononcée que prévu. Soulignons également que les données du marché du travail sont rétrospectives, c’est-à-dire que ce marché s’affaiblit généralement en dernier.
- La trajectoire et le point d’atterrissage final attendu de l’inflation. Différentes sources de données ont donné des signaux contradictoires. L’inflation globale a diminué de moitié vers la fin de l’année, avec des baisses séquentielles importantes. Chacune des cinq sources d’inflation – marges, salaires, pétrole, denrées alimentaires et loyers – est en train de s’essouffler, de sorte que les risques semblent se diriger en territoire accommodant.
- Réactions des banques centrales. Les banques centrales cherchent à ajuster leur politique monétaire de sorte qu’elle soit davantage tournée vers l’avenir que vers le passé, à un moment où de nombreux points de données avancés et ex post envoient des messages différents. Si l’inversion soudaine des courbes de taux obligataires et le brusque revirement du resserrement monétaire en début de période peuvent être le signe d’une erreur de politique de la part de la banque centrale, les points d’équilibre se situent sans doute à des niveaux plus « Goldilocks ». Nous notons que les marchés n’ont jamais « adhéré » au taux final prévu par Réserve fédérale américaine.
- Possibilité d’une croissance désynchronisée dans différentes parties du monde. Cela pourrait favoriser la Chine au détriment des États-Unis. Nous notons que des mesures telles que les lignes de production doubles (basées sur la contamination ou non d’un employé par la Covid-19) ont diminué l’impact des hausses de taux de contamination au sein des chaînes d’approvisionnement. La Chine pourrait être l’un des rares pays où la croissance serait plus élevée cette année qu’en 2022.
Globalement, nous « ne privilégions pas » la prise de risque. Notre approche est prudente et neutre à l’égard des actions, équilibrée par une position longue sur les obligations d’entreprises européennes Investment Grade et sur les matières premières (voir l’aperçu des classes d’actifs ci-dessous).
Au niveau géographique, nous préférons les actions asiatiques, qu’il s’agisse de l’Asie émergente au sens large ou de la Chine en particulier, du fait de la dynamique créée par la réouverture de l’économie chinoise. Nous surveillons de près des pays tels que la Corée du Sud et Taïwan, qui sont souvent considérés comme des indicateurs de retournement du cycle et où trop de mauvaises nouvelles pourraient être « intégrées ».
Actions – La quête de valeur
Tous les marchés actions n’ont pas été créés égaux et n’ont pas non plus enregistré les mêmes performances. Ainsi, selon nous, ils ne sont pas universellement bon marché ou onéreux. Jusqu’à présent, le rebond de 2023 a été presque entièrement tiré par les valorisations, rendant de nombreux marchés plus onéreux. Mais sous le capot, les valeurs technologiques américaines, les valeurs chinoises et les valeurs de l’Asie émergente nous semblent relativement attractives, tandis que les actions européennes nous paraissent plus chères ; du fait d’anticipations de bénéfices relativement élevées, les indicateurs standard de ratio cours/bénéfice ne sont que visiblement bon marché. En effet, si l’on examine l’ensemble des marchés, l’Europe se distingue par des prévisions de bénéfices trop optimistes pour 2023.
Certes, les prévisions de bénéfices aux États-Unis sont tombées à leur plus bas niveau pour un mois de décembre depuis 1986 (voir le Graphique 1) et les révisions de bénéfices sont proches de niveaux récessionnistes (nous « privilégions » les actions américaines ; voir le tableau ci-dessous). En revanche, les prévisions de bénéfices en Europe ont beaucoup moins évolué et le soutien apporté par la faiblesse de l’euro et le secteur financier pourrait ne pas durer.
Notre positionnement reflète ces différences : nous avons une position longue sur les actions américaines et chinoises et courte sur les actions européennes.
Obligations – Qu’intègrent-elles ?
Les primes des obligations sont repassées en dessous des primes des actions. Les rendements réels en ont été le principal moteur. Toutefois, nous sommes frappés par l’aplatissement des courbes des taux de points morts, qui indiquent des conditions de type « Goldilocks », contrairement aux courbes des taux nominales – 80 % de la courbe américaine est désormais inversée, ce qui est un signe de récession (voir le graphique 2). En Europe, les craintes d’une « erreur » de la banque centrale se sont également insinuées dans les valorisations, un assouplissement brutal étant attendu après un (sur)resserrement au premier semestre.
Nous restons donc prudents à l’égard des emprunts d’État et des obligations indexées sur l’inflation.
Aperçu des classes d’actifs
Avertissement
